Bas-Fonds

[Mademoiselle Pit]

// Elles attendaient. Meliane observait les deux extrémités de la rue, attendant d'y voir surgir l'homme qu'elle guettait depuis le début de la semaine. Elle jeta un coup d'œil à Yaaleen. Elle aussi était concentrée et surveillait les passants. Ses sourcils étaient très légèrement froncés. //

— Tu sais vers quelle heure il vient généralement ? Et je pensais que tu ne le connaissais pas ? J'ai mal compris ce que tu m'as expliqué précédemment ?

// Meliane allait répondre, mais son interlocutrice la prit de court. //

— Par contre je ne veux pas me faire remarquer ici, alors si on peut éviter de se battre, ce serait préférable.

— Je n'affectionne pas particulièrement le combat non plus, tant qu'il n'est pas nécessaire. Je suis désolée, j'étais tellement déterminée et sûre de moi que je ne t'ai pas vraiment expliqué la situation dans laquelle je me trouve.

// Elle fit une pause, pour accrocher toute l'attention de Yaaleen. //

— Je t'ai déjà expliqué que c'est ici que remontent mes plus lointains souvenirs, d'il n'y a pas si longtemps. La première chose que j'ai faite, en quittant Al-Far, c'est m'isoler de tout pour faire le vide en moi. Ensuite, j'ai beaucoup voyagé pour me remplir de choses solides qui constitueront les bases de ma nouvelle vie. J'ai appris à connaître et comprendre le monde en belligérance qui m'entourait, ses merveilles et ses dangers, ses paradis et ses enfers. Mais surtout j'ai appris à me connaître, moi.

// Meliane leva les yeux vers le ciel, nostalgique. //

— J'avoue regretter un peu cette époque. J'ai appris des choses passionnantes, rencontrés des gens fantastiques, vu des endroits merveilleux. J'ai réussi à me construire et un avenir s'est à nouveau profilé devant moi. Mais il me restait une chose à faire.

// Elle planta son regard dans celui de Yaaleen. //

— Ma perte de mémoire m'a beaucoup fait souffrir, et si aujourd'hui j'en parle si facilement, c'est uniquement parce que je suis déterminée à mettre fin à toutes ces interrogations qui me torturent. Pour cela, j'ai été voir des marchands d'armes, je leur ai posé des questions, montré ma cicatrice. Ils m'ont écoutée et répondu. Montré le type d'arme qui peut causer ce genre de blessure. Guidée vers les différents commerces où je pouvais en trouver. J'espérais en m'approchant de ces magasins y voir rôder quelqu'un qui me reconnaîtrait, et c'est ici que cela s'est enfin produit.

// Meliane lâcha un rire las. //

— Mon agresseur n'est pas très futé, tu vois il n'a même pas changé de ville après m'avoir blessée. Quand je l'ai croisé pour la première fois, j'ai tout de suite su que j'avais trouvé celui que je cherchais, car il m'évite et me regarde avec crainte, comme s'il avait peur que je me venge. Il porte à la ceinture cette lame recourbée que nous avons vue tout à l'heure. Je ne compte pas me venger car ce serait stupide et inutile. Nous n'aurons donc pas à nous battre. Je veux juste qu'il réponde à mes questions. Je veux juste comprendre. Je veux juste savoir.

// Elle prit une grande inspiration. //

— En bref, je ne connais pas cet homme, je n'avais encore jamais vu son visage avant le début de la semaine, mais je suis persuadée que c'est lui que je cherche. Je l'ai suivi tous les jours pour connaître ses habitudes. Pour répondre à ta question, il ne devrait plus tarder, car il vient ici chaque soir à la tombée de la nuit. Il vient toujours seul, bois un verre, puis s'en va.

// Alors que Yaaleen et Meliane parlait, un homme apparut à l'angle de la ruelle. Elles ne le virent pas tout de suite. Sa barbe miteuse cachait mal un visage osseux. Sa peau tannée par le soleil laissait ressortir deux yeux bleus comme le ciel. Qui s'agrandirent de terreur lorsqu'il aperçut deux jeunes femmes discutant à la terrasse de sa taverne favorite. Il pâlit. La plus jeune lui faisait face. Ses yeux noires se vrillèrent dans les siens. Elle dit quelque chose qu'il n'entendit pas, mais il put lire ses paroles sur ses lèvres.

— Il est là.

[Katleen Makerley]

// Une nouvelle fois, Yaaleen écouta l'histoire de sa nouvelle rencontre. C'était un récit noir et elle n'enviait pas le moins du monde la jeune femme. Elle la respectait pour être retournée à l'endroit où elle s'était faite agresser. Et le fait de ne pas avoir la souvenance de ce qu'il s'était passé devait être difficile à vivre, la marchombre n'aurait aimé pour rien au monde perdre la mémoire. Oublier tous ses proches, ses bons souvenirs était sûrement très complexe à vivre. //

- En bref, je ne connais pas cet homme, je n'avais encore jamais vu son visage avant le début de la semaine, mais je suis persuadée que c'est lui que je cherche. Je l'ai suivi tous les jours pour connaître ses habitudes. Pour répondre à ta question, il ne devrait plus tarder, car il vient ici chaque soir à la tombée de la nuit. Il vient toujours seul, boit un verre, puis s'en va.

// Il serait assurément facile à trouver dans ce cas. Et il n'était pas question de laisser passer l'occasion de le piéger.

Méliane lui indiqua la présence de l'énergumène. Alors Yaaleen serra son couteau de la main droite. Il n'allait pas leur échapper. C'était impossible. Il sentit la menace des deux jeunes femmes et se mit à courir par là où il était arrivé. Instinctivement, la marchombre prit vite de la hauteur en montant sur les toits. Au moins, elle l'aurait toujours en vue même s'il cherchait à se cacher dans les plus petites ruelles de la cité. Irrémissiblement, il allait finir par être coincé.

La benjamine des deux était, elle, passée par le bas et parcourait les rues à la recherche du malfrat qui lui avait tout volé. Yaaleen la surveillait d'un oeil. Il ne manquait plus qu'il lui arrive de nouveau un pépin. Finalement, la marchombre finit par descendre un à un les toits en apercevant le bandit bloqué dans un trou de souris. Elle sauta derrière lui et attendit patiemment que sa compagne arrive.

Elle sortit un deuxième couteau, histoire de montrer à l'homme qu'elle était dangereuse. Puis quand Méliane les rejoignit, Yaaleen s'avança vers le prisonnier. //

- Parle, ordonna-t-elle.

// L'homme tremblait, sentant qu'il n'avait aucune chance face à ces deux jeunes femmes qui étaient prêtes à tout pour avoir des réponses. //

[Mademoiselle Pit]

// Dès que Meliane eût indiqué à sa camarade la présence de l'homme qu'elles cherchaient, Yaaleen se leva et l'individu s'engagea en courant dans la ruelle d'où il était arrivé. Bien vite, la plus âgée rejoignit les toits, tandis que la plus jeune se faufilait entre badauds et marchands à la poursuite de leur cible. Sachant que Yaaleen surveillait de haut le chemin qu'il empruntait, Meliane se concentra sur sa propre trajectoire pour ne pas perdre une seconde.

Elle le tenait enfin et n'avait pas l'intention de lui laisser la moindre chance de leur échapper.

Au bout de quelques instants de course folle dans les bas-fonds d'Al-Far, la jeune femme finit par atteindre une ultime ruelle, sans anicroche malgré les rues plus ou moins bondées qu'elle avait dû traverser à la hâte.

Yaaleen l'attendait, campée sur ses deux pieds, un couteau dans chaque main, face à un homme aux yeux écarquillés de terreur. La ruelle, minuscule et étroite, dans laquelle elle se trouvait se terminait en cul-de-sac, sans aucune issue. Lorsqu'elle vit la jeune femme, presque féroce, un frisson parcourue Meliane, et elle fut contente de l'avoir pour alliée. Yaaleen la remarqua rapidement et s'avança vers l'homme. Qui recula. Jusqu'à toucher le mur. Coincé, comme une proie. //

— Parle.

// Sous un air faussement assuré, l'homme blêmit. Il tremblait, fixait Yaaleen avec l'air de celui qui ce demande s'il a une chance de s'en sortir. //

— Je... je... Quoi ? Qu'est ce que..., bafouilla-t-il.

// Exaspérée, Meliane s'avança vers lui d'un bon pas, jusqu'à se retrouver presque nez à nez avec lui. //

— Quel est ton nom, misérable ?, cracha-t-elle, poings serrés.

// Il parut reprendre confiance face à une question si simple, et se redressa un peu. //

— Je suis Tillan, aux ordres d...

// Meliane avait saisi son cou et le maintenait serré entre son pouce et son index. Elle pouvait sentir au bout de ses doigts les pulsations de sang s'accélérer. Plaquant l'homme contre le mur, elle se pencha vers lui et, les machoires serrées par la colère, chuchota à son oreille. //

— À partir de maintenant, tu n'es aux ordres de personnes d'autre que moi. Je vais te lâcher et tu vas gentiment répondre à nos questions. Entendu ?

— Entendu, s'étouffa-t-il.

— Je préfère ça. Tu es l'homme qui m'a agressée il y a plus d'un an dans cette même ville. Inutile de le nier, ce n'était pas une question. Nous ne te ferons pas de mal si tu nous dis la vérité. Qui es-tu ? Pourquoi as-tu voulu me tuer ?

— Je... Je ne sais rien, mon maître m'a indiqué une cible, je n'ai fais qu'obéir à ses ordres, je... je...

— Qui est ton maître ?

— Je ne sais pas, il ne donne jamais son nom, c'est un messager qui transmet ses ordres, on ne sait rien de lui.

— On ?

— Nous sommes une petite troupe à ses ordres dans la ville, pour remplir les missions qu'il nous confit.

— Quel genre de mission ?

— Je ne peux pas le dire, c'est confid...

— Quel genre de mission ?

— Si je vous le dis, vous me me laisser tranquille ?

// Meliane le fusilla du regard sans répondre. //

— Eh bien souvent il s'agit de récupérer des documents, de voler certains objets, ou de suivre quelqu'un... Je ne sais rien de plus, laissez moi, maintenant, je ne sais même pas qui vous êtes !

// À la colère de Meliane s'ajouta de la frustration, la frustration de ne pouvoir récolter que d'autres questions au lieu des réponses souhaitées. Peut-être valait-il mieux laisser s'effacer les regrets d'un passé perdu et se concentrer sur les fondations d'un avenir à créer. Peut-être que chercher qui elle était avant sa perte de mémoire ne serait qu'effectuer un vain voyage, rétrograde et dénué de sens ou d'intérêt. Sans regarder Yaaleen, Meliane dit à son intention : //

— Je pense qu'on ne pourra rien en tirer d'autre. Tant pis. Je ne veux plus l'entendre parler. On en fait quoi ?

[Katleen Makerley]

// Yaaleen laissa la place à Méliane qui remplit son rôle à merveille. Le malfrat tremblait vraiment et il semblait être pégué au sol. Il était tellement terrorisé qu'il n'osait plus bouger. La marchombre laissa échapper un sourire sournois, fière de ce qu'elle venait de faire. Il était en train de godailler ses vêtements, il n'arrêtait pas de les triturer. Mouvement inconscient que l'on développait lorsque l'on avait peur.

La marchombre écouta d'une oreille l'interrogatoire que sa cadette menait. Elle surveillait les alentours au cas où le bandit ait un complice. Après quelques minutes, elle arriva à la conclusion qu'il était bien seul et qu'il était inconscient de se balader dans une ville où la moitié des habitants pouvait lui en vouloir. Enfin, c'était sûrement parce que d'habitude il était en position de force et non de victime.

Une fois les questions finies, Méliane relâcha l'homme et la brune s'approcha. //

- Je pense qu'on ne pourra rien en tirer d'autre. Tant pis. Je ne veux plus l'entendre parler. On en fait quoi ?

// Yaaleen fit mine de réfléchir alors qu'elle savait très bien ce qu'elle allait faire. Elle n'allait certainement pas le tuer. Il n'en valait clairement pas la peine. De toute façon, il ne représentait aucune menace et si c'était le cas de son maître, alors ce dernier tâcherait de retrouver la marchombre et celle-ci lui réglerait son compte. //

- Laisse-le partir. S'il a un minimum de bon sens, il ne parlerait de ce moment à personne et sinon... il sait à qui il aura affaire, lança-t-elle à l'intention du criminel qui était prêt à partir.

// Il s'enfuit en courant et la marchombre prit la parole. //

- Je vais devoir te laisser ici, si tu as besoin de mon aide, pense à moi très fort et je saurai te retrouver. J'espère que tout ceci t'a aidé et je te souhaite bonne chance pour la suite.

// Yaaleen enfila sa cape, mit sa capuche et quitta les lieux dans un bruit de tissus à peine audible. //

[Fin du RP]

[Yasashi]

[Début de RP entre Adrek Jidan (Katleen Makerley) et Neraka Izaan (Yasashi)]

// Les bas quartiers d'Al-Far étaient agités ce jour-là, enfin pas forcément plus que d'habitude en soi. C'était le matin et les rues battaient leur plein, toujours rythmées par les mêmes événements. Les marchants vendaient ce qu'ils avaient à vendre à qui voulait bien, ou pouvait bien l'acheter et les passants avançaient dans toute cette agitation. Les plus habitués savaient que ce n'était pas un endroit sûr pour toute petite pièce de monnaie, mais certains n'étaient pas encore au courant de ça.

C’était eux que Neraka était en train de traquer avec ses amis Gowen et Minya. Adossée au mur d’une vieille maison, à l’angle entre la plus grande rue du coin et une ruelle moins fréquentée, elle observait le passage des gens avec attention, légèrement tapie dans l’ombre. Les gens avisés cachaient leur bourse pour que de petites mains ne puissent pas les délester de leurs pièces, mais tout le monde ne le faisait pas. Cet homme par exemple, qui venait d’acheter une pomme à un marchant, qui n’avait pas remis sa bourse dans sa veste mais dans sa poche de pantalon, dépassant légèrement, était devenu une cible bénie pour la jeune demoiselle. Silencieuse, elle se glissa dans la foule, se mettant à suivre sa future bourse. Elle savait que Gowen et Minya n’étaient pas loin, c’était toujours comme ça qu’ils fonctionnaient : pendant que Neraka s’occupait de subtiliser les bourses, les plus jeunes surveillaient ses arrières, prêts à réceptionner les trophées pendant qu’ils cherchaient une nouvelle cible.

Au fur et à mesure, la jeune fille se rapprochait de celui qu’elle allait voler, tendant bientôt la main pour lui emprunter à durée indéterminée son argent, se laissant ensuite reculer dans la foule, son butin dans les mains, pour rejoindre la ruelle où étaient ses amis. Gowen vint vers elle avec un sourire. //

- T’as eu quelque chose ?
- Evidemment !

// Elle fit sauter légèrement la bourse dans sa main avec un grand sourire. //

- On va pouvoir manger un peu ce midi !
- Attention !

// Alors que Neraka allait ouvrir la bourse pour montrer ce qu’il y avait dedans, Minya avait crié à son attention. Dans un ultime réflexe, la blonde avait plongé en avant, sentant une main attraper un de ses cheveux et le lui arraché en essayant de la retenir. En se retournant, elle aperçut le propriétaire de l’argent juste derrière elle. Étonnamment, il avait l’air bien peu content, mais tendit la main vers la demoiselle. //

- Rends-moi ça gamine.

// Reculant de quelques pas, l’adolescente observa l’adulte rapidement. Plutôt grand, il semblait assez musclé, bien qu’il n’ait pas une carrure très importante. Autant dire qu’elle préférait tout de même éviter qu’il réussisse à l’attraper. D’un geste du poignet, elle lança discrètement la bourse à Gowen, qui se mit à partir en courant avec Minya. Neraka, elle, était restée sur le chemin, empêchant donc l’homme de poursuivre ses amis, mais lui laissant surtout croire qu’elle avait toujours la bourse, faisant un mouvement vers sa poche, comme si elle y mettait la bourse avant de reculer lentement.
Elle ne voulait pas se battre contre cet homme, elle n’avait pas assez d’hybris pour penser ne serait-ce qu’une seconde qu’elle avait une chance, mais elle voulait faire gagner du temps à ses amis. Au moins, elle pouvait compter sur son habilité à esquiver, un peu…

L’homme s’avança, essayant de l’attraper, mais elle fit un bond en arrière. Il chargea de nouveau, tentant de lui attraper le bras, mais elle se décala, se rendant compte trop tard de la feinte et se prenant une énorme claque. Se tenant la joue, elle recula encore, s’enfonçant dans la ruelle à reculons. Il semblait savoir se battre, contrairement à ce qu’elle avait pu penser au premier abord, et la colère qui grandissait dans ses yeux, inextinguible, était loin d’être rassurante. L’homme repartir à l’attaque, mais Neraka l’évita d’une roulade arrière, en profitant pour vérifier que ses deux jeunes amis avaient disparu. Plus de trace d’eux nulle part, elle allait pouvoir fausser compagnie à son charmant ami. Elle tourna les talons, s’enfuyant en courant, mais constata bien vite qu’elle n’arrivait pas à le distancer. Après tout, elle était loin d’être rapide en course, et encore moins particulièrement endurante. Elle devait trouver autre chose… D’un bond, elle se propulsa en l’air, attrapant la corniche d’une fenêtre pour se hisser de plus en plus haut le long de la paroi de la maison, n’étant bientôt plus à la portée de son poursuivant qui pesta. //

- Reviens ici !

// Elle ne daigna même pas se retourner, finissant son ascension pour s’écrouler sur le toit, épuisée, se tenant la joue. C’était qu’il n’y était pas allé de main morte le bougre !! //

[Adrek Jidan]

// Adrek Jidan croqua dans une pomme tout en observant les environs. Il aimait épier les moindre gestes d'un marchand, le frémissement des moustaches des chats qui erraient dans le quartier, les ailes des oiseaux se déployer dans le ciel... Tout l'intéressait et l'émerveillait presque. C'est grâce à ce talent et loisir qu'il vit une jeune fille voler une bourse à un homme imposant.

** Elle n'a pas froid aux yeux cette gamine ! **, pensa-t-il.

Si elle se faisait prendre sur le fait, elle risquait d'être passée à tabac par cet homme qui ne semblait absolument pas conciliant. Quelques instants passèrent et ce qui devait arriver arriva. L'homme se rendit compte du vol dont il venait d'être victime et s'avança, menaçant, vers la blonde. Celle-ci se délesta de la bourse pleine en la lançant à ses amis qui partirent à toute vitesse, loin de toute menace. La jeune fille, quant à elle, resta un instant face à l'homme, le temps semblait-il de laisser ses copains s'enfuir.

Adrek avait déjà pris la décision d'intervenir s'il le fallait, mais il voulait voir de quoi la fille était capable avant cela. Pourquoi ? Il n'en avait aucune idée, mais suivre son instinct était le meilleur choix possible qu'il pouvait prendre. La blonde était agile, c'était un fait incontestable. Elle n'arrêtait pas d'esquiver les coups de l'homme qui commençait à sérieusement s'énerver. Puis elle prit son élan et commença à courir parmi les marchands. Le marchombre la poursuivit, toujours discrètement, et fut agréablement étonné de la voir bondir de rebord de fenêtre en rebord de fenêtre sur une façade. L'homme en colère finit par tourner les talons. Il devait sûrement avoir plus d'argent que cela puisqu'il était prêt à abandonner sa bourse à la première difficulté.

Adrek grimpa rapidement à son tour la maison. Sur le toit, il observa silencieusement la jeune fille écroulée au sol qui reprenait son souffle. //

- Quelle démonstration d'agilité ! Ou as-tu appris à te débrouiller ainsi ?

[Yasashi]

// La jeune fille n’allait pas se mentir, elle était épuisée. Courir comme ça n’était pas dans ses habitudes et elle avait puisé dans ses dernières forces pour grimper le plus vite possible le long de cette fichue maison, mais au moins, ici, elle allait pouvoir se reposer en sécurité, l’homme qui la poursuivait n’ayant pas la carrure d’un grimpeur. Et puis s’il avait voulu grimper, il l’aurait fait avant, pas une fois qu’elle était hors d’atteinte ! Elle s’estimait donc plutôt en posture convenable, ne pensant pas que quelqu’un viendrait l’embêter ici.

** Encore un instant et j’irai retrouver Gowen et Minya à l’endroit habituel… **

Mais avant d’avoir pu mettre ses pensées en œuvre, Neraka entendit une voix qui lui fit relever la tête, se redressant brusquement et s’éloignant d’un bond légèrement instable. Avant même d’étaler dans son esprit ce que cette personne avait dit, elle l’observa avec attention, sur ses gardes. Elle ne l’avait absolument pas entendu arriver, pourtant il devait probablement avoir escaladé, comme elle, pour atteindre cet endroit ! Puis les paroles atteignirent son cerveau et elle plissa les yeux. Que commentait-il ? Son vol, son esquive pendant le combat ou bien la petite grimpette jusqu’en haut de la maison ? Elle ne le savait pas vraiment, mais d’une certaine façon, elle n’aimait pas ça. Peut-être était-il allié avec l’homme qu’elle avait volé ? Mais pourquoi lui parlerait-il alors ? Il pourrait récupérer très rapidement la bourse… //

- Ici, dans les rues d’Al-Far. Vous êtes avec l’autre en bas là ?

// Du regard, elle observa rapidement les environs, cherchant un moyen de s’enfuir rapidement si elle en avait le besoin face à cet homme. //

[Adrek Jidan]

// Sa question sembla sortir la jeune fille d'une torpeur gagnée par l'effort. Elle se redressa et s'éloigna instinctivement d'Adrek qui sourit imperceptiblement. Il avait, comme d'habitude, l'effet escompté. La blonde le dévisagea quelques instants. La prenait-il au sérieux ou pensait-elle au contraire qu'il n'était rien qu'une personne de plus la dérangeant dans sa journée plutôt fructueuse ? //

- Ici, dans les rues d’Al-Far. Vous êtes avec l’autre en bas là ?

// Cela ne l'étonnait pas. Il avait eu la même enfance. Cette situation lui rappela sa rencontre avec son maître des années auparavant. Situation assez similaire : vol, course-poursuite effrénée... Peut-être le même potentiel, qui sait ? S'il avait cru au destin, le marchombre aurait parié que la jeune fille était la bonne. La première apprentie à qui il enseignerait la Voie. Mais il n'était pas de ce bord là, il avait besoin de preuves. Et ce n'était pas une petite grimpette sur la façade d'une maison qui tâcherait de le convaincre. //

- Je ne m'associe pas avec ce genre de personne peu déterminée. Il a abandonné son argent à la moindre difficulté.

// Un silence s'instaura pendant quelques secondes. Comment la convaincre de lui démontrer ses aptitudes ? La jeune fille semblait fatiguée de l'effort qu'elle venait de fournir. Cela ne servirait donc à rien de l'emmener dans une autre course sur les toits d'Al-Far. Qui plus est, elle avait sûrement hâte de rejoindre ses amis pour récupérer sa part du butin et pouvoir grignoter quelque chose pour le repas. Mais il ne voulait pas non plus la laisser s'échapper pour ne plus jamais la retrouver. Et puis, elle était jeune après tout. Il était sûr qu'elle regorgeait encore d'une force dont elle ne soupçonnait pas l'existence. //

- Que dis-tu de m'accompagner dans une balade sur les toits avant de rejoindre tes amis ? Tes capacités d'escalade m'intéressent.

// Mieux valait être honnête et ne pas tourner autour du pot. //

[Yasashi]

// Neraka ne quittait pas l’homme des yeux, sur ses gardes. Ses appuis étaient pensés pour pouvoir fuir au moindre mouvement brusque de cet inconnu, mais son instinct lui soufflait que s’il voulait lui faire du mal, elle n’aurait aucune chance de s’enfuir. Il avait réussi à tromper ses oreilles en montant sans faire le moindre bruit, donc elle ne se donnait pas une maigre chance. Pourtant, elle ne se sentait pas en danger, déjà parce qu’elle relevait le fait qu’il l’avait surprise, et non tuée, ce qu’il aurait largement pu faire vu qu’elle ne l’avait pas entendu, mais en plus, ce qu’elle ressentait était pour cet homme était plus proche de la curiosité étrange que de la peur. Elle aurait été incapable de donner une explication à ses impressions, mais il avait l’air presque sage.

Aux paroles de l’homme, le regard de la demoiselle erra légèrement vers la rue, comme ils parlaient de celui à qui elle avait volé la bourse, mais il se planta rapidement sur l’homme, comme attiré par l’aimant que représentaient ses yeux vert sombre. //

- Pas une carrure de grimpeur…

// Elle ne savait pas pourquoi elle lui répondait. D’une certaine façon, elle pouvait partir, tout simplement, en lui disant de la laisser tranquille, mais elle n’arrivait pas à s’imaginer partir maintenant, elle voulait savoir, même si elle ignorait quoi.

Les paroles suivantes de son interlocuteur la firent légèrement plisser des yeux, la faisant répondre sans même réfléchir. //

- Vous m’avez suivie… !

// S’il savait pour ses amis, c’était qu’il était là depuis le début et avait assisté à toute la scène, sans intervenir. Elle aurait pu s’indigner, et elle l’avait fait un peu, mais elle essayait surtout de comprendre pourquoi. Elle n’était plus qu’une petite voleuse des rues, comme tant d’enfants à Al-Far, alors pourquoi l’avait-il suivie ? Et pourquoi, surtout, lui proposait-il une balade sur les toits ? S’il avait vu toute la scène, il savait qu’elle était épuisée, et ça se voyait de toute manière, mais il lui proposait ça, alors même que ses capacités d’escalade à lui devaient frôler la perfection par rapport à celles de l’adolescente ! //

- Mes capacités d’escalade vous intéressent ? Alors même que les vôtres sont probablement mille fois meilleures ? J’ai du mal à y croire… C’est quoi le but ? Vérifier que je ne fais pas partie de ce genre de personnes peu déterminées ?

// Elle fit un petit sourire amusé, qu’elle perdit légèrement en se demandant ce qu’il allait répondre. En soi, elle n’était pas contre cette petite balade, même si elle ne connaissait pas ce type, ça pourrait lui permettre d’en savoir un peu plus. Ce qui l’inquiétait surtout, c’était sa fatigue. Elle savait qu’elle avait repris un peu avant qu’il n’arrive, et qu’elle serait probablement capable d’escalader un peu, mais elle avait peur que son épuisement lui fasse faire des erreurs… //

[Adrek Jidan]

- Vous m’avez suivie… !

// Adrek esquissa un léger sourire. Elle comprenait vite. Il attendit qu'elle lui réponde définitivement afin de déterminer si cela valait le coup de rester perché sur ce toit ou s'il pouvait continuer ses observations dans Al-Far. //

- Mes capacités d’escalade vous intéressent ? Alors même que les vôtres sont probablement mille fois meilleures ? J’ai du mal à y croire… C’est quoi le but ? Vérifier que je ne fais pas partie de ce genre de personnes peu déterminées ?

// Le marchombre laissa un ange passer pour montrer à quel point la patience était importante. Il n'était pas question non plus de faire trépigner la jeune fille bien évidemment. //

- Je grimpe mille fois mieux que toi comme tu le dis grâce aux constants entraînements que je m'octroie. Tu peux arriver au même niveau et le dépasser si tu en as la volonté. Mais le souhaites-tu ?

// Adrek aurait pu comprendre que la blonde refuse sa proposition et qu'elle s'en aille aussi vite qu'elle était arrivée, mais une partie de lui espérait sincèrement qu'elle accepterait cette balade. Il sentait que leur rencontre n'était pas une coïncidence. Il pouvait même affirmer au plus profond de lui que toute cette situation n'était pas anodine. //

- Alors qu'en dis-tu ? demanda-t-il après quelques minutes de silence.

// Puis, sans prévenir, il s'élança sur le toit voisin tout en se retournant pour voir si la jeune fille le suivait. //